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PAGES DU PRATICIEN
Médecine personnalisée à l'ère de la génomique
Wylie Burke, MD, PhD;
Bruce M. Psaty, MD, PhD
Des prédictions enthousiastes sur la médecine
personnalisée ont été faites lors du
séquençage du génome humain. Utilisé de
façon simple, ce terme prédit une avancée dans la
prévention de la maladie et le traitement médicamenteux sur la
base des connaissances des susceptibilités génétiques
individuelles.1,2
Selon Guttmacher et collaborateurs, "la connaissance et les outils se
basant sur la génomique promettent la possibilité d'approcher
chaque patient comme l'individu biologique qu'il ou elle est, modifiant ainsi
radicalement nos paradigmes et améliorant
l'efficacité."3
Certains test émergeants sont en faveur de cette promesse: mutations
des gènes BRCA1 et BRCA2 pour identifier les femmes qui ont un risque
élevé sur une vie de cancer du sein et de
l'ovaire4 et
qui sont candidates à dépistage par imagerie à
résonance
magnétique5
ou une chirurgie
prophylactique.6
Pareillement, de nombreux tests pharmacogénétiques sont en
développement pour améliorer la sécurité et
l'efficacité du traitement
médicamenteux.7
Dans chaque cas, l'application utile d'un test génétique est
liée à une intervention qui améliore les
résultats. Néanmoins, la revendication d'un nouveau paradigme
médical se basant sur la génomique mérite un examen
soigneux. L'exhortation à préparer une « révolution
génomique
»8
présume souvent que le risque génétique est
différent en nature que les autres risques de santé. Les
praticiens expérimentés peuvent avec raison questionner cette
hypothèse et également ouvrir le débit pour savoir quelle
proportion des tests génétiques a une probabilité de
contribuer aux soins médicaux des patients sur un plan individuel. Bien
que la recherche génomique se traduira sûrement par des
bénéfices, une évaluation réaliste suggère
que la génomique ne contribuera que modestement à une
médecine personnalisée dans sa pratique traditionnelle.
Prédiction du risque génétique
Comme le démontre l'exemple du BRCA, les tests
génétiques peuvent parfois prédire des risques
substantiels pour des maladies communes. Mais, les mutations BRCA sont rares
et expliquent seulement une faible minorité de cas de cancers du sein;
la plupart des facteurs génétiques contribuant au risque de
cancer ont seulement de faibles
effets.9-11
En effet, la demande de réunir de larges cohortes pour faire de la
recherche
génomique12,13
provient de la connaissance que la plupart des variants
génétiques associés à des maladies communes
n'auront que des effets modestes, souvent générant des risques
relatifs de 2 ou moins. Des grandes études de population sont donc
nécessaires pour obtenir une puissance suffisante pour évaluer
et les
répliquer.12
Comme avec les autres facteurs de risque sanitaire, les risques de cette
importance à l'échelle de la population auront en
général peu de résultats pour prédire le pronostic
à l'échelle
individuelle.14,15
Par extension, de nombreuses associations valides entre gene-maladie ont
probablement une utilité limitée en tant que tests
génétiques prédictifs.
Ce problème peut être par ailleurs démontré par
des recherches prometteuses sur la génétique de la DMLA
(dégénérescence maculaire liée à
l'âge). Les variants de plusieurs gènes ont maintenant ont
été identifiés en tant que facteurs de risque de cette
affection,16-19
avec des rapports de cotes pour les allèles du risqué allant de
1.25 à 3 dans la forme hétérozygote et 2 à 7 dans
la forme homozygote. Certains variant protecteurs ont aussi été
identifiés. Les fréquences des allèles mineurs pour la
plupart des gènes sont élevées, allant de 10% à
40% dans la plupart des
études.16-19
Ces observations ont un grand intérêt scientifique car elles
confirment l'importance des deux mécanismes dans l'étiologie de
la DMLA, impliquant la voie du complément et
l'angiogénèse. La recherche génomique fournit des outils
pour identifier les nouvelles voies biologiques importantes qui sont
impliquées. Mais ces observations représentent-elles une
étape vers le futur pour une médecine personnalisée ?
Utilisation des informations du risque génétique comme guide à la prévention
Les informations sur le risque génétique peuvent
prévenir la maladie seulement si elles améliorant le
comportement des interventions médicales ou comportementales. Le cas le
plus évident est lorsqu'une seule intervention est nécessaire
chez des individus ayant un génotype particulier. Par exemple, un
régime pauvre en phénylalanine prévient le retard mental
chez les patients ayant une phénylcétonurie, mais il est
délétère chez ceux ayant un génotype
normal.20
Le dépistage du BRCA représente un exemple identique bien que
moins dramatique, fournissant des informations qui justifient l'utilisation
d'interventions agressives pour un faible nombre de femmes à haut
risque.6
En se basant sur ces exemples, une approche sur mesure plus
générale des soins par rapport au risque individuel est attirant
de façon intuitive. Cependant, de nombreuses stratégies de
prévention efficaces, comme le test de Papanicolaou et les vaccinations
des enfants, sont offertes de façon appropriée et
indépendamment du statut du risque. Une des stratégies les plus
importantes disponibles pour les patients entre dans cette catégorie :
la constellation de comportements qui constituent une hygiène de
vie-exercice régulier, un régime pauvre en graisses et riches en
fruit et légumes, l'abstinence vis-à-vis du tabac et le
contrôle de l'obésité.
Le dépistage génétique a néanmoins
été suggéré comme guide pour les modifications de
l'hygiène de vie. Le tabagisme et l'obésité sont tous
deux des facteurs de risque de DMLA, par exemple, et les chercheurs ont
suggéré que l'identification des patients à risque
élevé de DMLA pourrait leur apporter un rationnel pour
interrompre le tabac ou en faveur d'un
régime.16
A côté des doutes que l'on a de savoir si la connaissance du
risque génétique motive les modifications
comportementales,21
cette stratégie rend l'hypothèse questionnable que la
prévention du risque est préférable aux mesures à
l'échelle de la
population,15
ignorant dans ce cas les larges bénéfices pour la population
dans un grande variété de problèmes de
santé—incluant le traitement ou la prévention du cancer du
poumon, les cardiopathies, l'hypertension, la dyslipidémie,
l'obésité, le diabète, la dépression—qui
dériveraient même de petites améliorations du
régime, de l'exercice et du tabagisme.
Profilage génétique avec des panels multigènes
Les informations fournies par les tests génétiques peuvent
être accrues par le dépistage de multiples variants de
gène associés à des maladies. Dans le cas de la DMLA, les
variants d'au moins 4 différents gènes ont été
impliqués dans le
risque.16-19
Un dépistage multigènes peut représenter un moyen
d'identifier des individus qui ont un risqué élevé en
raison de la transmission de multiples variants de gènes. Par exemple,
une étude a estimé que les individus qui sont homozgotes pour
deux variants de gènes différents associés à la
DMLA ont un risque multiplié par pour cette
affection.16
L'identification des personnes ayant ce niveau de risque aurait une
utilité clinique si des mesures spécifiques pouvaient être
offertes pour prévenir ou retarder le début de la DMLA.
Toutefois, ces personnes sont rares—environ 1 sur 400—et les
tests pour les trouver identifient aussi beau-coup plus d'individus ayant des
génotypes de risque moins élevé. Pour chaque personne
ayant une estimation d'un risque en excès multiplié par 50 de
DMLA, par exemple, environ 22 personnes ayant un risque modéré
(rapport de cotes, 6-10) et presque 100 ayant un risque plus faible (rapport
de cotes, 3-4) seraient
identifiés.16
Des résultats identiques ont été obtenus avec un
modèle incorporant des variants de 3 gènes; ce modèle
pourrait identifier des personnes dans un spectre multipliant par plus de 100
le risque de DMLA, mais le risque pour la plupart des personnes était
proche de la moyenne de la
population.19
Une DMLA survient aussi chez des personnes sans variants connus de risque. A
chaque niveau de risque, les résultats personnels varient en raison des
autres facteurs de risque non pris en compte par le test
génétique.14,15
Si de nouveaux traitements sont associés à des
événements indésirables sévères, la
compensation risque-bénéfice variera probablement
considérablement dans le spectre des risques.
Avec l'extension du panel des gènes, le dépistage
génétique identifiera également de façon
inévitable les génotypes ayant une signification clinique
inconnue,22
incluant des combinaisons de variants de gène à haut risque et
protecteurs avec des effets inconnus. Aussi, l'évaluation du
dépistage avec un panel pour des variants multiples doit prendre en
compte à la fois les résultats sanitaires chez les personnes
à haut risque et les dommages potentiels d'identifier des patients
ayant des risques modestes ou pauvrement caractérisés. Des
dommages peuvent inclure l'anxiété, la discrimination, et
l'exposition à des traitements non documentés ou à des
thérapies qui peuvent avoir des effets secondaires
sévères.
Besoin de preuve
Chaque nouveau test génétique aura besoin d'être
évalué pour démontrer que les bénéfices
globaux sur la santé dépassent les dommages avant de le mettre
en pratique. Le principe fondamental est que les informations sur le risque
génétique ne seront utiles que si elles guident une utilisation
plus efficace, ou plus rentable d'interventions médicales qui
pourraient être obtenues sans information sur le risque. Comme le
décrit la méthodologie de la US Preventive Services Task
Force,23 les
preuves définitives demandent des études comparatives qui
évaluent tous les résultats pertinents du dépistage et
les effets de toute intervention clinique associée. Les tests
génétiques pour le risque de DMLA pourraient être utiles,
par exemple, s'ils pouvaient montrer qu'ils entraînent une
amélioration des résultats sur la vision de la population par un
dépistage ophtalmique ou un traitement pharmacologique dans des groupes
à risque identifiés par le dépistage et
n'entraînaient pas de dommages inacceptables.
Par essence, le dépistage des susceptibilités
génétiques a besoin d'être justifié par la preuve
que le variant du gène ou le profil génétique modifie
l'effet du traitement (par augmentant son efficacité ou sa
tolérance par exemple) avant de recommander le test comme
méthode pour allouer le traitement. Même si un effet
thérapeutique était présent, le problème des
coûts, de l'acceptabilité ou des risques de la procédure
de test peuvent jouer contre une utilisation large du test. Par exemple,
lorsque des informations sur le risque sont utiles pour identifier les
candidates à des interventions, le risque génétique peut
ne pas être la meilleure approche. Par exemple, se centrer sur le
dépistage de la DMLA chez les fumeurs et les personnes ayant un
passé d'exposition intense à la
lumière24
peut être plus utile qu'un dépistage basé sur le risque
génétique.
Interventions basées sur le génome
De nouvelles interventions cliniques basées sur la connaissance
génomique constituent une autre voie, bien qu'indirecte
d'utilité clinique. Comme avec la DMLA, de nombreuses observations
issues de la recherche génomique apporteront probablement de nouveaux
indices à la biologie de la maladie en identifiant les gènes et
les voies biologiques qui sont de façon inattendues associées au
processus
pathologique.15,25
Avec le temps—typiquement des décennies—une meilleure
connaissance de la biologie de la maladie peut produire de nouvelles approches
au traitement ou à la prévention. La recherche génomique
sur la DMLA pourrait de cette façon apporter d'importantes
contributions à la prévention de la perte visuelle
associée à la DMLA. Cette méthode est au mieux un long
procédé et le succès n'est pas garanti : 60 ans
après avoir défini la cause moléculaire de la
sicklanémie, le traitement définitif fait encore défaut.
Plus important, si des interventions sont développées en
recherche génomique, leur utilisation ne dépendra pas
nécessairement du dépistage génétique dans le
cadre d'une utilisation appropriée. De nouveaux traitements de la DMLA,
par exemple, pourraient bien prouver leur efficacité pour tous les
patients ayant des signes précoces de la maladie.
Le futur de la médecine personnalisé
L'utilisation des informations sur le risque génétique pour
guider les interventions, doit être justifiée par des
données démontrant une amélioration des résultats,
une diminution des coûts, ou les deux. Compte tenu des incertitudes sur
la prédiction du risque et le faible effet taille de la plupart des
facteurs du risque génétique dans des maladies communes, un
dépistage génétique prédictif jouera probablement
un rôle modeste dans la prévention de ces maladies, avec
relativement peu de soins médicaux qui seront améliorés
par la connaissance du profil génétique du patient. Les limites
de la prédiction du risque génétique ne diminuent pas
l'importance de la médecine personnalisée. Elles servent
plutôt de rappel sur le fait que des soins réellement personnels,
comme le font les médecins depuis des siècles, se basent sur la
relation entre le patient et le médecin plutôt que sur une
technologie particulière. Même à l'ère
génomique, la focalisation sur les besoins individuels et les
préoccupations du patient resteront le centre des soins et si les
dépistages génétiques attirent l'attention des
médecins loin d'une préoccupation spécifique d'un
patient, il peut interférer avec la pratique de la médecine
personnalisée. La connaissance des circonstances de la vie d'un
patient, parfois acquises lentement au cours des soins longitudinaux, permet
à un patient de choisir de façon personnalisée la
thérapeutique et le processus de prise de décision. Les
circonstances familiales, comme le soin d'une épouse souffrante,
peuvent limiter les options d'un patient. Des morbidités concomitantes
peuvent rendre plus appropriés certains traitements, régime ou
programmes d'exercice que d'autres. Un patient qui a besoin d'un fauteuil
roulant demandera un programme de prévention cardiaque différent
qu'un coureur de marathon—et un profilage génétique peut
ne pas aider à faire un bon choix. Une compréhension
compatissante des valeurs du patient et du style de prise de décision
peut aussi améliorer les soins. Les efforts de prévention
impliquent souvent de peser le pour et le contre des différents choix,
comme dans la prise de décision sur l'emploi de la mesure du PSA
(prostate-specific antigen) ou d'un traitement de substitution hormonal. Des
pours et contres similaires émergeront probablement avec le profilage
génétique, en particulier si les tests pour identifier des
individus à haut risque impliquent le coût de dépistage de
nombreuses personnes à risque modérée et ayant des
options cliniques incertaines. Les soins personnalisés incluent
l'effort du médecin pour apporter des informations et soutenir les
choix de ces tests de la manière la mieux adaptée à
chaque patient. La médecine personnalisée a toujours
été un élément des bonnes pratiques
médicales. Les tests génétiques peuvent fournir de
nouveaux outils, mais ils ne modifient pas l'objectif fondamental des
praticiens pour adapter des tests médicaux et des technologies aux
circonstances individuelles de leurs patients. Les tests
génétiques devenant largement disponibles, la médecine
personnalisée inclura d'aider les patients à utiliser de
façon raisonnée l'évaluation du risque
génétique, en prenant en compte les précautions
discutées dans cet article. Lorsqu'un dépistage
génétique sera utilisé, la nature personnalisée
des soins s'étendra bien au-delà des séquences de paires
de bases du patient.
Informations sur les auteurs
| | Correspondance : Wylie Burke, MD, PhD, Department of Medical History and
Ethics, Box 257120, University of Washington, Seattle,WA 98195
(wbuk{at}u.washington.edu).
Liens financiers : Aucun déclaré
Financement/Soutien : Ce travail a bénéficié du
soutien partiel sous la forme des bourses P50HG003374 du National Human Genome
Research Institute (Dr Burke) et HL43201, HL60739, L68639, HL74745, HL080295,
HL087652 et HL085251 du National Heart, Lung, and Blood Institute (Dr
Psaty).
Rôle du sponsor : Les organisations ayant financé et
les sponsors n'ont joué aucun rôle dans le schéma, la
conduite de l'étude, le recueil, la gestion, l'analyse et
l'interprétation des données, pas plus que dans la
préparation, la revue ou l'approbation du manuscrit.
Affiliations des auteurs : Center for Genomics and Healthcare
Equality and Departments of Medical History and Ethics and Medicine et
Cardiovascular Health Research Unit, Departments of Medicine, Epidemiology,
and Health Service et Health Service Center for Health Studies, Group Health,
University of Washington, Seattle.
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Cette semaine dans le JAMA
JAMA. 2007;298:1605.
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