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  Vol. 297 No. 23, 20 juin 2007 TABLE OF CONTENTS
  L'Examen Clinique Rationnel
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LES PAGES DU PRATICIEN
Ce patient présente-t-il un érythème migrant?

Carrie D. Tibbles, MD; Jonathan A. Edlow, MD


RÉSUMÉ

Contexte L'érythème migrant, bien que non pathognomonique, est la manifestation la plus fréquente du stade précoce de la maladie de Lyme. Un diagnostic précis de ce rash est essentiel à l'initiation d'une antibiothérapie appropriée.

Objectif Déterminer la sensibilité des données de l'interrogatoire et de l'examen physique pour le diagnostic de l'érythème migrant.

Sources de données Recherches structurées sur MEDLINE des articles de langue anglaise publiés entre 1966 et mars 2007.

Sélection des études Les études étaient incluses si elles recrutaient au moins 15 patients consécutifs avec un diagnostic d'érythème migrant et si elles rapportaient les données initiales relatives à l'interrogatoire et à l'examen physique des patients.

Extraction des données Un auteur a procédé à l'extraction des données des études.

Résultats Nous avons analysé séparément les études menées en Europe et étudié les régions d'endémie et sans endémie de maladie de Lyme aux États-Unis pour rechercher les différences potentielles dans sa présentation clinique. Trente-deux études menées en Europe, 20 effectuées aux Etats-Unis, et 1 concernant l'Europe et les États-Unis répondaient aux critères d'inclusion, pour un total de 8 493 patients. La sensibilité de chacune des variables a été calculée. Aucune étude n'incluait de patients sans érythème migrant, de sorte que les données de spécificité et les rapports de vraisemblance n'ont pas pu être déterminés. De nombreux patients n'ont pas le souvenir d'une piqûre de tique. Des symptômes systémiques associés, comme la fièvre et les céphalées, sont fréquemment rapportés. Les nausées et les vomissements sont rares. La lésion solitaire est la présentation la plus fréquente chez les patients américains (81 %; intervalle de confiance [IC] à 95 %, 72%-87%) comme chez les patients européens (88 %, IC 95 %, 81 %-93 %). L'éclaircissement central est moins fréquent dans les zones d'endémie des États-Unis (19%; IC 95 %, 11 %-32 %) comparé à l'Europe (79 %; IC 95 %, 69 %-86 %) et aux régions sans endémie des États-Unis (80 %; IC 95 %, 63 %-90 %).

Conclusions Notre analyse de la littérature actuellement disponible suggère qu'aucun élément isolé de l'interrogatoire ou de l'examen clinique n'est en soi hautement sensible pour le diagnostic de l'érythème migrant. Les cliniciens doivent être informés de la grande variabilité de sa présentation clinique et de la nécessité de prendre en compte les multiples composantes de l'examen clinique, ainsi que le contexte épidémiologique.

JAMA. 2007;297:2617-2627



CAS CLINIQUE

Un homme de 22 ans se présente aux urgences avec une éruption cutanée rouge sur l'épaule gauche, légèrement prurigineuse, qui s'est étendue depuis qu'il l'a remarquée 3 jours plus tôt. On est en juillet, il exerce une activité en plein air dans le New Jersey, mais n'a aucun souvenir d'une piqûre de tique. Le patient est afébrile. Le rash se présente sous la forme d'un érythème homogène maculaire et ovoïde, de 14 cm de long, sans décoloration centrale (Figure 1). En dehors d'un petit ganglion lymphatique de 1,5X1,5 cm peu sensible dans le creux axillaire gauche, l'examen physique est normal. Vous pensez que ce patient présente une forte probabilité d'érythème migrant et envisagez de le traiter sans effectuer d'examen complémentaire.


Figure 1
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Figure 1.. Rash érythémateux évoluant sur l'épaule depuis 3 jours


Définitions

En 1908, le dermatologue suédois Afezelius1 décrivait l'érythème migrant comme un érythème extensif avec éclaircissement central, apparaissant au point de piqûre de la tique du mouton européenne Ixodes ricinus. Au cours des décennies suivantes, des investigateurs européens ont documenté les caractéristiques du rash (précédemment appelé érythème chronique migrateur), son association avec les morsures de tiques, sa réponse aux antibiotiques, et sa relation avec d'autres manifestations de ce que l'on appelle la maladie de Lyme ou borréliose de Lyme.1

Le terme arthrite de Lyme a été créé à la fin des années 1970, à la suite d'une investigation sur un groupe de cas statistiquement improbable d'une maladie diagnostiquée à tort comme une polyarthrite rhumatoïde juvénile dans la région de Lyme, Connecticut. Cette recherche, menée par une équipe de l'université de Yale, était axée sur l'arthrite; cependant, il s'est rapidement avéré que les manifestations entre autres cardiaques, neurologiques et cutanées, étaient les composantes d'une maladie systémique transmise par la morsure de la tique Ixodes scapularis.2-4 En 1982, Burgdorfer5 et ses collègues du Rocky Mountain Laboratory (National Institutes of Health) ont découvert l'organisme responsable de la maladie, une nouvelle bactérie appelée Borrelia burgdorferi (sensu stricto). Peu de temps après, 2 spirochètes étroitement liés, Borrelia afzelii et Borrelia garinii, ont été isolés dans des cas européens d'érythème migrant.6,7 Ces 3 bactéries sont regroupées sous l'appellation B burgdorferi sensu lato. Pendant des années, l'érythème migrant a été considéré comme pathognomonique de la maladie de Lyme. Cependant, de récents cas de rash à type d'érythème migrant rapportés dans des zones sans endémie des États-Unis ont remis ce concept en question.

Au cours des 15 dernières années, des médecins de Caroline du Nord et du Sud, de Géorgie, du Tennessee et du Missouri ont rapporté des cas de patients présentant des rash morphologiquement identiques à l'érythème migrant,8-12 dont le vecteur était la tique Amblyomma americanum.8-13 Cette nouvelle entité a été dénommée southern tick-associated rash illness (STARI) ou maladie de Masters.14 Le STARI n'est pas causé par B burgdorferi et se distingue donc de la maladie de Lyme.15,16 Certains cas ont été associés à un nouveau spirochète appelé Borrelia lonestari;17,18 cependant, cet organisme n'a été détecté dans aucun des 31 cas de STARI du Missouri.15 En conséquence, le spectre complet des étiologies du STARI n'est pas établi. Malgré le manque d'études contrôlées démontrant l'efficacité des antibiotiques chez les patients atteints de STARI (comme cela était le cas pour la maladie de Lyme avant 198019), les cliniciens en charge de ces patients les avaient tous traités par des antimicrobiens ciblant borrelia,9-12 et beaucoup prônent l'antibiothérapie en se basant sur des résultats uniformément favorables.9-11 Ainsi, 3 groupes de patients avec érythème migrant sont définis, avec différents types de spirochètes responsables et de tiques vectrices (patients avec maladie de Lyme aux États-Unis, ceux avec maladie de Lyme en Europe, et ceux avec STARI; Tableau 1). Bien que globalement, la morphologie de l'érythème migrant de ces 3 groupes de patients présente certaines variations,12,20-24 il existe des chevauchements significatifs qui rendent ces distinctions d'une moindre utilité clinique chez les patients individuels.


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Tableau 1.. Caractéristiques de l'érythème migrant en fonction de la localisation géographique


En conséquence, bien que la maladie de Lyme soit la cause la plus fréquente de l'érythème migrant, le rash ne permet pas d'établir le diagnostic de cette maladie. Le diagnostic de l'érythème migrant, quelle qu'en soit la cause, déclenche une action clinique spécifique - la prescription d'antibiotiques. Dans cet article, nous définissons donc l'érythème migrant comme une manifestation clinique cutanée causée par la maladie de Lyme ou le STARI, maladies vectorielles à tiques, requérant une antibiothérapie.


Figure 2
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Figure 2.. Cas rapportés de maladie de Lyme par mois d'apparition de la maladie, États-Unis, 1992-2004

D'après les Centers for Disease Control and Prevention (http://www.cdc.gov/ncidod/dvbid/lyme/ld_rptmthofill.htm)


Considérations anatomiques, physiologiques et épidémiologiques

Dans la maladie de Lyme, après la morsure d'une tique infectée, le spirochète B .burgdorferi peut être transmis dans la peau de l'hôte.6 Du fait que Borrelia migre du tube digestif de la tique vers les glandes salivaires après la piqûre, l'attachement d'une tique pendant moins de 24 heures entraîne rarement une infection.25 L'érythème migrant solitaire apparaît au point de piqûre de la tique. L'infection peut rester localisée sur la peau autour de la piqûre ou s'étendre de manière systémique par voie sanguine ou lymphatique.26-28; Une spirochétémie a été observée dans 44 % des cas dans une récente étude de 213 patients.29

Les patients de tout âge, sexe ou race peuvent développer un érythème migrant. Les facteurs géographiques comme les lieux de résidence, de voyage, ou de pratique d'activités de loisir sont des éléments importants, dans la mesure où l'incidence de la maladie de Lyme diffère en fonction des zones géographiques. Aux États-Unis, la plupart des cas sont rapportés dans 8 états: New York, New Jersey, Rhode Island, Connecticut, Pennsylvanie, Maryland, Delaware, et Wisconsin.30 Les données épidémiologiques suggèrent que seuls 10 % des cas sont rapportés.31


POURQUOI IMPORTE-T-IL DE RÉPONDRE PAR L'EXAMEN CLINIQUE?

En pratique de routine, de nombreuses sources indiquent que le diagnostic de l'érythème migrant (EM) est posé cliniquement.6,7,32,33

L'examen sérologique de l'EM causé par la maladie de Lyme est faussement négatif dans la moitié des cas à la présentation.34-37 L'histologie est non spécifique. L'isolement de B. burgdorferi dans les lésions d'EM n'est positif que dans 40 % à 86 % des cas.34 La recherche d'ADN de Borrelia par PCR (polymerase chain reaction) est positive dans 36 % à 88 % des cas.34,38-40 La mise en culture, qui est également longue et coûteuse, n'est utile que chez les patients non traités, ce qui limite sa validité en pratique de routine.34 Ainsi, même si ces techniques permettent de mieux comprendre la maladie de Lyme, elles ne sont ni disponibles en routine ni utilisées par la plupart des cliniciens. Le critère établi par les CDC (Centers for Disease Control and Prevention) pour le diagnosticdu stade précoce de la maladie de Lyme, conçu pour standardiser la surveillance nationale et non pour la prise de décision chez les patients individuels, est un diagnostic clinique de rash supérieur ou égal à 5 cm, suspecté d'être un érythème migrant. 41 La définition clinique des CDC est la suivante:

<< À des fins de surveillance, l'érythème migrant est défini par une lésion cutanée débutant typiquement par une macule ou une papule rouge, s'étendant au fil des jours, voire des semaines, pour former une large lésion concentrique, souvent caractérisée par une décoloration partielle en son centre. Une lésion solitaire doit mesurer au moins 5 cm. Des lésions secondaires peuvent également apparaître. Les érythèmes annulaires survenant quelques heures après une piqûre de tique correspondent à des réactions d'hypersensibilité et ne doivent pas être confondus avec un érythème migrant. Chez la plupart des patients, la lésion érythémateuse extensive s'accompagne d'autres symptômes aigus incluant fatigue, fièvre, céphalées, légère raideur de la nuque, arthralgies ou myalgies. Ces symptômes sont typiquement intermittents. Le diagnostic d'érythème migrant doit être posé par un médecin. Une confirmation biologique est recommandée chez les personnes sans exposition connue.>>(www.cdc.gov/epo/dphsi/casedef/lyme_disease_1995.htm. Dernière consultation, 14 février 2007).

La définition de cas européenne de l'EM est similaire à celle des CDC, mais sans spécification de la taille du rash: << plaque extensive rouge à violacée, souvent avec décoloration centrale. Le bord de la lésion est en général nettement défini et de couleur vive, sans relief marqué >> (http://meduni09.edis.at/eucalb/diagnostis_case-definition-outline.html. Dernière consultation, 28 février 2007).


Figure 3
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Figure 3.. Morphologie et répartition géographique approximative des tiques vectrices sur le continent américain

Les agrandissements des représentations des tiques sont à la même échelle sur chaque panneau. La taille réelle est représentée dans les cercles. Panneau du haut, tiques vectrices de la maladie de Lyme. La morphologie de I. pacificus est similaire à celle de I. scapularis (représentée). Panneau central, tique vectrice (A. americanum) du STARI (southern tick-associated rash illness). L'érythème migrant est une manifestation de la maladie de Lyme et du STARI. Les tiques figurant sur le panneau inférieur sont incluses à titre de comparaison; elles sont les principales vectrices de Rickettsia rickettsii, l'agent pathogène de la fièvre pourprée des Montagnes Rocheuses. La morphologie de D. andersoni (représentée) est similaire à celle de D. variabilis (représentée). Les répartitions géographiques sont approximatives et peuvent varier au fil du temps. Les cartes de distribution sont basées sur les données des CDC (Centers for Disease Control and Prevention) (http://www.cdc.gov/ncidod/dvrd). Les données de répartition de A. americanum et D. variabilis sont actualisées sur la base des informations fournies par John F. Anderson, PhD, The Connecticut Agricultural Experiment Station, New Haven (communication écrite, 22 mai 2007).


Dans les cas d'érythèmes migrants causés par la maladie de STARI, les tests de dépistage direct et sérologique sont généralement négatifs. C'est pourquoi la référence de facto pour le diagnostic d'EM reste le jugement du médecin, basé sur les antécédents du patient et l'aspect du rash. Bien que cette définition soit tautologique, il n'en existe pas de meilleure disponible à l'heure actuelle.Il est essentiel d'établir le diagnostic de l'érythème migrant, dans la mesure où les patients traités par un antibiotique oral approprié à ce stade de la maladie présentent d'excellents résultats, avec des taux de guérison dépassant 90 %. 42-44 Parmi les patients non traités avec un EM dû à la maladie de Lyme, environ 5 % à 8 % développeront des atteintes cardiaques; 15 % à 20 % des troubles neurologiques; et 40 % à 60 % une arthrite.4,6 Par ailleurs, l'identification précoce de l'EM et l'initiation d'une antibiothérapie adaptée permettent de prévenir les manifestations tardives de la maladie de Lyme; 3 de plus, les résultats cliniques sont excellents.42,43 Chez les patients avec STARI, les résultats du traitement sont également excellents.8-12 Le manque de données à long terme sur les patients non traités exclut toute conclusion définitive sur le risque de répercussions à long terme dans ce groupe.


Figure 4
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Figure 4.. Patients avec érythème migrant

A, La partie centrale du rash suggère une décoloration. B, La présence de multiples lésions discrètes sur le dos indique une dissémination hématogène du spirochète. (Photographies, avec l'aimable autorisation de Ryan Friedberg, MD).


Bien que l'antibiothérapie précoce soit fondamentale, il existe de nombreux rash différents ressemblant à l'érythème migrant32 (Tableau 2). Un médecin familiarisé avec l'aspect et les caractéristiques cliniques du rash peut initier des antimicrobiens adaptés chez les patients avec érythème migrant, et rassurer, éviter une antibiothérapie superflue et fournir un traitement approprié chez les autres patients. Ainsi, le diagnostic d'érythème migrant repose typiquement sur un interrogatoire et un examen physique précis, interprétés dans le contexte épidémiologique.6,7,32


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Tableau 2.. Quelques diagnostics différentiels de l'érythème migrant*


Comment recueillir les signes et symptômes

Le diagnostic d'érythème migrant nécessite une analyse détaillée des antécédents du patient, incluant son exposition potentielle aux tiques, associée à l'examen clinique du rash.32 Le contexte épidémiologique est important, dans la mesure où la plupart des cas survient en mai, juin, juillet, et août, période de grande activité des nymphes de I. scapularis et A. americanum30 (Figure 2). La localisation géographique, lieu d'exposition aux tiques, et l'antécédent connu d'une piqûre de tique sont également des éléments majeurs.30 Lorsque les patients se souviennent avoir été piqués (ou sont même en mesure d'apporter la tique pour la montrer à leur médecin), cela permet de mieux appréhender les différentes apparences des tiques (Figure 3).

La plupart des patients piqués par I scapulari45,46 ne se souviennent pas de leur piqûre (un pourcentage plus élevé de patients piqués par A. americanum s'en souvient12). En conséquence, l'interrogatoire du patient sur ses activités spécifiques est essentiel pour déterminer son risque d'exposition. Les facteurs épidémiologiques saisonnier et géographique, ainsi que l'exposition réelle ou potentielle aux tiques suggèrent le diagnostic d'érythème migrant.32

Les médecins doivent interroger les patients rapportant une piqûre de tique sur le délai écoulé entre la piqûre et l'apparition du rash. Cette période d'incubation varie de 1 à 36 jours, et le plus souvent de 7 à 17 jours.32,33,44,45

Les médecins doivent également vérifier l'évolution du rash dans le temps, dans la mesure où la lente progression au fil des jours est un trait caractéristique de l'érythème migrant.32,33,45 Certains patients peuvent également présenter des symptômes systémiques incluant une faible fièvre ou des frissons.6,45 Des douleurs et des raideurs à la nuque, des arthralgies, des myalgies et des céphalées sont souvent rapportées.6,45

L'érythème migrant présente des caractéristiques qui permettent de le distinguer des autres rash.32 Sa couleur varie du rouge pâle au violet foncé. Bien que l'attention ait souvent été attirée sur le phénomène de décoloration centrale, avec un aspect de cocarde cerclée de rouge ou de cible, la majorité des rash de l'érythème migrant des régions d'endémie d'Amérique du Nord sont homogènes en couleur et en aspect.45

Comparé à l'érythème migrant de la maladie de Lyme (dans l'état de New York), celui du STARI (du Missouri) est susceptible d'être plus petit, avec une décoloration centrale et moins de symptômes systémiques.12 La décoloration centrale de l'érythème est partiellement fonction de la durée du rash. Plus un érythème migrant persiste, plus il est susceptible de présenter cette décoloration (Figure 4). Elle est plus fréquente dans les cas européens d'EM23 et dans le STARI (malgré un délai entre la piqûre de tique et le rash tendant à être plus court dans ce dernier groupe).12 La taille constitue un autre facteur discriminant utile, l'EM étant souvent plus étendu que les rash des diagnostics différentiels. Sa taille médiane est de 16 cm,45 mais il peut atteindre jusqu'à 70 cm dans certains cas.46 La lésion est généralement maculaire, bien que certaines présentent des reliefs au centre (comme des vésicules ou un point au site de morsure) ou de petites élevures en bordure.

L'érythème migrant survient généralement sur le corps, là où les tiques s'alimentent: les plis de flexion, les zones où leur progression est entravée par une bande élastique de vêtement, et à la naissance des cheveux chez l'enfant.32 Ces localisations seraient inhabituelles pour la cellulite communautaire.

Environ 20 % des patients présentent des lésions multiples, indiquant une dissémination hématogène du spirochète 45-47 (Figure 4). Dans les 24 heures suivant l'initiation du traitement de la maladie de Lyme, environ 15 % des patients présentent une réaction de Jarisch-Herxheimer.48-50 Sa présence contribue à corroborer l'exactitude du diagnostic d'érythème migrant et doit être distinguée d'une réaction allergique à l'antibiotique. L'aggravation transitoire caractéristique du rash avec des symptômes pseudo-grippaux survient consécutivement à la libération de cytokines liée à l'éradication des spirochètes. Dans cette revue, nous avons analysé la littérature publiée pour déterminer la valeur diagnostique de l'interrogatoire clinique et de l'examen physique, afin d'aider les médecins à diagnostiquer précisément l'érythème migrant et à traiter la maladie de Lyme et le STARI à un stade où les antibiotiques sont généralement curatifs.


MÉTHODES

Stratégie de recherche

Nous avons recherché, dans la base de données électronique MEDLINE, les articles de langue anglaise publiés entre 1966 et mars 2007, en utilisant les termes de recherche érythème migrant et érythème chronique migrateur. Les listes de références des articles et revues identifiés ont également été examinées pour rechercher les éventuelles études omises dans la recherche initiale sur MEDLINE.

Critères d'inclusion et évaluation qualitative

Les deux auteurs ont revu indépendamment les titres et les résumés des articles pour déterminer leur éligibilité pour les analyses ultérieures. Pour être éligible, une étude devait répondre à 2 critères: 1 avoir inclus au moins 15 patients consécutifs avec un diagnostic d'érythème migrant et2 disposer des données source concernant les antécédents et l'examen physique des patients. Le seuil de 15 patients a été retenu après examen du nombre d'études potentiellement éligibles. Pour les études ayant moins de 15 patients affectés, un critère pour lequel la sensibilité était de 0 (c'est-à-dire qu'aucun patient n'avait le critère), la limite supérieure de l'intervalle de confiance à 95 % nous permettait de conclure que la sensibilité ne dépassait très probablement pas 18 %. En conséquence, moins de 2 sur 10 patients affectés devaient présenter le critère. Bien que nous ayons voulu identifier les articles décrivant la sensibilité et la spécificité des signes et symptômes d'érythème migrant, nous n'avons trouvé aucune étude rapportant la spécificité. Notre objectif a donc été de fournir des données de sensibilité concluantes pour le diagnostic clinique de l'érythème migrant.

Analyse statistique

Les données cliniques pertinentes ont été extraites pour chaque étude. Pour chaque variable de l'interrogatoire ou de l'examen physique, nous avons analysé les 10 plus grandes études. Lorsque les variables étaient rapportées dans moins de 10 études, nous avons inclus toutes les études. Ces données ont été groupées et analysées par un modèle à effets aléatoires. Les estimations en pourcentage des éléments spécifiques de l'interrogatoire et de l'examen physique des patients avec érythème migrant ont été calculées. Compte tenu du fait que l'agent responsable de l'EM varie en fonction des régions, nous avons analysé séparément les études menées en Europe et celles des régions d'endémie et sans endémie des États-Unis pour rechercher les différences potentielles dans la présentation clinique de l'EM.


RÉSULTATS

Notre recherche dans la littérature a produit 1 266 articles; la revue des titres et des résumés a restreint ce résultat à 185 articles potentiels. Après examen de chaque article intégral, nous avons conservé 53 articles qui répondaient aux critères d'inclusion. Sur ce total, nous avons retenu 32 études européennes, 20 études américaines, et 1 concernant l'Europe et les États-Unis, avec un total combiné de 8 493 patients. Quarante et une de ces 53 études rapportaient le sexe des patients. Sur 5 702 patients, 2 750 étaient de sexe masculin (48 %) et 2 952 de sexe féminin (52 %). La liste des études européennes incluses dans cet article est rapportée dans le Tableau 3, et celle des études européennes et américaines figure dans le Tableau 4. Les deux tableaux indiquent le nombre total de patients et la méthode de référence utilisée pour diagnostiquer l'érythème migrant.


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Tableau 3.. Études européennes et américaines incluses



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Tableau 4.. Études américaines incluses


Antécédents et symptômes associés

La plupart des études rapportait le souvenir des patients d'une piqûre de tique. Les symptômes systémiques associés, comme la fièvre et les céphalées, étaient également fréquemment rapportés. La sensibilité de ces symptômes chez les patients diagnostiqués avec un EM dans les régions d'endémie de maladie de Lyme aux États-Unis et en Europe est rapportée dans le Tableau 5. Parmi les patients américains des zones d'endémie, les symptômes systémiques survenaient chez plus de la moitié des patients (bien qu'avec un large intervalle de confiance, 52 %-76 %). Plus de la moitié des patients européens rapportaient un antécédent de piqûre de tique connue.


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Tableau 5.. Antécédents et symptômes associés dans l'érythème migrant


Certains symptômes avaient une sensibilité pour l'érythème migrant de moins de 25 %. Les nausées et les vomissements avaient une faible incidence chez les patients américains de zones d'endémie (11 %; intervalle de confiance [IC] 95 %, 6,0 %-17 %) comme chez les patients européens (3,0 %; IC 95 %, 2,0 %-6,0 %). Les autres caractéristiques des patients européens avec une sensibilité résumée de moins de 25 % incluaient la fièvre (7,0 %; IC 95 %, 4,0 %-10 %), les myalgies (10 %; IC 95 %, 6,0 %-15 %), et les arthralgies (15 %; IC 95 %, 10 %-23 %).

Données de l'examen physique

L'aspect du rash a été décrit dans la majorité des études. Cependant, très peu de données de l'examen physique sont rapportées (Tableau 6). Dix sept études européennes et 12 études américaines incluaient des patients avec EM isolé et lésions multiples. La lésion solitaire est la présentation la plus fréquente chez les patients américains (81 %; IC 95 %, 72 %-87 %) comme chez les européens (88 %; IC 95 %, 81 %-93 %), suggérant que seulement un cinquième des patients américains et un dixième des patients européens présentent des lésions d'EM multiples. La décoloration centrale est nettement rare chez les patients américains de zones d'endémie de maladie de Lyme (19 %; IC 95 %, 11 %-32 %) vs patients européens (79 %; IC 95 %, 69 %-86 %). Nous avons également analysé les caractéristiques de l'interrogatoire et de l'examen physique des patients avec STARI, bien que peu de séries soient décrites dans la littérature. La plupart des patients avec STARI se rappelaient la piqûre de tique (89 %; IC 95 %, 67 %-97 %) et présentaient une décoloration centrale du rash (80 %; IC 95 %, 63 %-90 %). Les caractéristiques cliniques des patients avec un EM dû au STARI sont rapportées dans le Tableau 7.


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Tableau 6.. Critères de l'examen physique dans l'érythème migrant



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Tableau 7.. Caractéristiques cliniques de l'érythème migrant dans les États du sud-est (sans endémie)



RÉSOLUTION DU CAS

L'histoire clinique et l'examen physique du patient présenté concordent avec l'érythème migrant. Son rash présente la morphologie caractéristique de l'EM, bien qu'il n'ait pas l'aspect classique en cocarde cerclée de rouge. Le contexte épidémiologique est correct; le patient exerce une activité en plein air dans une région d'endémie de maladie de Lyme et a développé le rash pendant la saison d'activité maximale des tiques. Dans la mesure où ces données correspondent à l'érythème migrant, il est raisonnable de traiter ce patient par des antibiotiques actifs contre B. burgdorferi sans examen diagnostique supplémentaire.


CONCLUSION CLINIQUE

Il existe malheureusement peu de données de qualité permettant d'aider les praticiens à résoudre ce cas clinique avec un quelconque degré de certitude scientifique. Aucune des études caractérisant les patients avec érythème migrant n'était une étude prospective, utilisant une méthode de référence appropriée, appliquée à des patients consécutifs avec et sans érythème migrant. Ainsi, le clinicien reste confronté à un véritable dilemme lorsqu'il rencontre un patient présentant un rash compatible avec un EM. Selon notre analyse, il apparaît qu'aucun critère isolé de l'interrogatoire ou de l'examen physique ne rend le diagnostic d'érythème migrant fortement probable. Comme avec de nombreuses entités en médecine clinique, il ne semble pas y avoir d'élément unique permettant d'établir le diagnostic d'EM, mais plutôt une combinaison de critères. Malheureusement, du fait qu'aucune des études n'était conçue pour évaluer des combinaisons d'éléments spécifiques de l'interrogatoire et de l'examen physique, la littérature ne fournit aucune indication aux praticiens sur la manière d'utiliser les combinaisons de critères pour établir le diagnostic. Les médecins doivent se fier à leur expérience clinique et prendre en compte la variation significative existant dans la morphologie de l'érythème migrant, la présence des symptômes systémiques, et le souvenir du patient d'une piqûre de tique. Dans la mesure où il n'existe pas de données biologiques invariablement positives, les cliniciens doivent couramment diagnostiquer l'érythème migrant en tenant compte des multiples composantes de l'interrogatoire et de l'examen physique, ainsi que du contexte épidémiologique, qui permettent conjointement d'augmenter la probabilité diagnostique.4,32,36,45,73

L'une des stratégies utilisées par certains cliniciens consiste à réexaminer le patient non traité dans les 48 à 72 heures. Une lésion cutanée qui s'est étendue rend l'érythème migrant plus probable qu'une lésion stable ou régressive.32

L'utilisation du diagnostic clinique de l'érythème migrant comme méthode diagnostique de référence est évidemment tautologique. Malheureusement, il n'existe pas de références appropriées permettant de tester la précision du diagnostic clinique. Certaines erreurs diagnostiques sont inévitables.88,89 Cependant, le recours à la positivité de la culture, de la PCR ou de la sérologie est fondamentalement lacunaire, dans la mesure où de nombreux cas d'EM de la maladie de Lyme et de tous les cas de STARI présentent des résultats négatifs à ces tests.34

Dans les zones d'endémie de maladie de Lyme, l'association d'une lésion solitaire de taille et de morphologie appropriées, de la présence de symptômes systémiques et d'un antécédent de piqûre de tique est suffisamment éloquente pour prendre une décision thérapeutique. En dehors de ces zones, ces mêmes facteurs suggèrent également un érythème migrant en raison du chevauchement géographique croissant entre les tiques vectrices de la maladie de Lyme et celles du STARI. L'espèce A. americanum s'est propagée dans les États du New Jersey et de New York, et est remontée jusqu'à l'extrême nord du pays, dans le Maine.90-93

Ainsi, la formation des médecins devrait insister sur la grande variabilité de la présentation clinique de l'érythème migrant et sur la nécessité de prendre en compte de multiples composantes de l'examen clinique ainsi que le contexte épidémiologique dans la décision clinique. Les médecins exerçant dans des zones sans endémie de maladie de Lyme, en particulier, doivent considérer en premier lieu des diagnostics différentiels pour les lésions solitaires à type de macule; si aucun ne semble probable, l'initiation d'un traitement antimicrobien est à envisager. Les études futures devront inclure des séries de patients consécutifs avec et sans EM. Jusqu'à ce qu'une méthode de référence adéquate soit trouvée, les cliniciens continueront de diagnostiquer cliniquement l'érythème migrant. Cependant, la preuve scientifique sous-tendant ce jugement est faible, et sa valeur diagnostique réelle reste indéterminée.


Informations sur les auteurs

Correspondance: Carrie D. Tibbles, MD, Beth Israel Deaconess Medical Center, Department of Emergency Medicine, Harvard Medical School, West Clinical Center 2, OneDeaconess Road, Boston,MA02215 (ctibbles{at}bidmc.harvard.edu).

Voir aussi Page du Patient.

FMC en ligne à www.jama.com

Rédacteurs de la section Examen Clinique Rationnel: David L. Simel, MD, MHS, Durham Veterans Affairs Medical Center and Duke University Medical Center, Durham, NC; Drummond Rennie, MD, Rédacteur en chef adjoint, JAMA.

Contributions des auteurs: Le Dr Tibbles a eu un accès complet à toutes les données de l'étude et accepte la responsabilité de l'intégrité des données et de l'exactitude de l'analyse des données.

Conception et schéma de l'étude: Tibbles, Edlow.

Recueil des données: Tibbles, Edlow.

Analyse et interprétation des données: Tibbles, Edlow.

Rédaction du manuscrit: Tibbles, Edlow.

Revue critique du manuscrit: Tibbles, Edlow.

Analyse statistique: Tibbles.

Liens financiers: Aucun déclaré.

Remerciements: Nous remercions David Simel, MD, MHS, Department of Medicine, Duke University, Durham, NC, pour avoir calculé les evaluations résumées à partir des données que nous lui avons fournies et John Anderson, PhD, Department d'Entomologie, Connecticut Agricultural Experiment Station, New Haven, Conn; Robert Trowbridge, MD, Department of Medicine, Maine Medical Center, Portland; Paul McKinney, MD, School of Public Health and Information Sciences, University of Louisville, Louisville, KY, pour leur revue critique du manuscrit. Aucun n'a reçu de compensation financière pour cette revue.

Affiliations des auteurs: Department of Emergency Medicine, Beth Israel Deaconess Medical Center, Boston, Mass.


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