Contexte LAmerican Diabetes Association et la Surviving Sepsis Campaign recommandent un contrôle strict de la glycémie chez le patient en état critique, en se fondant largement sur un essai ayant montré une réduction de la mortalité dans une unité de soins intensifs chirurgicaux. Des résultats différents ayant été observés dans des études similaires et un contrôle strict de la glycémie pouvant entraîner une hypoglycémie dangereuse, une évaluation critique des données qui sous-tendent cette recommandation est nécessaire.
Objectif Évaluer les effets bénéfiques et les risques du contrôle strict de la glycémie par rapport aux soins habituels chez le patient adulte en état critique.
Sources des données MEDLINE (de 1950 à 2008), la Cochrane Library, les registres dessais cliniques, les listes bibliographiques et les actes de conférences de lAmerican Thoracic Society (de 2001 à 2008) et de la Society of Critical Care Medicine (de 2004à 2008).
Sélection des études Nous avons recherché les études dans lesquelles des patients adultes de soins intensifs étaient répartis de façon aléatoire en plusieurs groupes, certains bénéficiant d'un contrôle strict de la glycémie et dautres d'un contrôle glycémique habituel, sans restriction de langue. Sur les 1 358 études identifiées, 34 essais randomisés (23 publications complètes, neuf résumés et deux études non publiées) remplissaient les critères dinclusion.
Extraction et analyse des données Deux auteurs ont extrait les données indépendamment en utilisant un protocole prédéterminé et évalué la qualité méthodologique à partir d'une échelle normalisée. Les investigateurs des études ont été contactés afin dobtenir certaines informations manquantes. Nous avons utilisé des modèles à effets fixes et aléatoires pour estimer les risques relatifs (RR).
Résultats 29 essais comparatifs randomisés portant sur 8 432 patients au total ont été inclus dans cette méta-analyse. Dans l'ensemble aucune différence na été observée en termes de mortalité hospitalière entre les patients ayant bénéficié d'un contrôle strict de la glycémie et ceux ayant reçu les soins habituels (21,6 % contre 23,3 % ; RR = 0,93 [intervalle de confiance (IC) 95 : 0,85-1,03]). Aucune différence significative en termes de mortalité n'a été mise en évidence en cas de stratification en fonction de la cible glycémique ([1] très stricte : 110 mg/dL : 23 % contre 25,2 % ; RR = 0,90 [IC95 : 0,77-1,04], ou [2] modérément stricte : < 150 mg/dL ; 17,3 % contre 18,0 % ; RR = 0,99 [IC95 : 0,83-1,18]) ou en fonction du type de lunité de soins intensifs ([1] chirurgicaux : 8,8 % contre 10,8 % ; RR = 0,88 [IC95 : 0,63-1,22] ; [2] médicaux : 26,9 % contre 29,7 % ; RR = 0,92 [IC95 : 0,82-1,04] ; ou [3] médico-chirurgicaux : 26,1% contre 27,0% ; RR = 0,95 [IC95 : 0,80-1,13]. Un contrôle strict de la glycémie n'a pas été associé à une réduction significative du risque de nouveau besoin de dialyse (11,2 % contre 12,1 % ; RR = 0,96 [IC95 : 0,76-1,20]), mais a été associé à une réduction significative du risque de septicémie (10,9 % contre 13,4 % ; RR = 0,76 [IC95 : 0,59-0,97] ; et à une augmentation significative du risque d'hypoglycémie (glucose 40 mg/dL ; 13,7 % contre 2,5 % ; RR = 5,13 [IC95 : 4,09-6,43]).
Conclusion Chez le patient adulte en état critique, un contrôle strict de la glycémie nest pas associé à une réduction significative de la mortalité hospitalière mais est associé à une augmentation du risque d'hypoglycémie.