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  Vol. 299 No. 16, 23/30 avril 2008 TABLE OF CONTENTS
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Participation aux dépenses de santé aux Etats-Unis et franchises médicales en France : une comparaison

Isabelle Durand-Zaleski, MD

Les articles de J Hsu et coll. et de J. Madden et coll. abordent, du point de vue du système de santé américain, la question de la relation entre l’accès aux soins et la santé d’une part, et la participation financière des usagers d’autre part. Cette question est aussi d’une grande actualité en France avec l’instauration des franchises non remboursable mais surtout avec les discussions autour de la suppression du remboursement à 100% des affections de longue durée (rapport Briet–Fragonard) et du bouclier sanitaire. 1

Aux Etats-Unis il n’existe pas d’assurance maladie publique obligatoire. Environ 60% de la population bénéficie d’une assurance maladie privée, financée en partie par l’employeur, 27% sont couverts par une assurance publique financée par l’état fédéral et les états:

MEDICAID et SCHIP qui concerne les personnes indigentes et les enfants (les familles qui sont en dessous d’un seuil de pauvreté déterminé par chaque Etat) soit environ 13% de la population.

MEDICARE qui concerne les personnes de plus de 65 ans et les personnes handicapées, ne pouvant travailler ou atteintes de maladies chroniques comme l’insuffisance rénale terminale. Ceci représente environ 14% de la population. De plus, il faut garder en mémoire que les bénéficiaires de MEDICARE qui en ont les moyens adhèrent en plus à une assurance privée et sont donc comptés deux fois dans les statistiques de couverture maladie

Enfin, 16% de la population ne bénéficie d’aucune couverture maladie. 2

Qui finance MEDICARE ? Les cotisations sociales des actifs, les impôts fédéraux et une part de cotisations volontaires des affiliés. Comment l’argent est-il utilisé ? La couverture MEDICARE comporte plusieurs parties, connues sous les lettres A, B, C, D.

Avant la réforme de 2003 MEDICARE se composait de deux parties A pour l’hospitalisation et les soins de suite, assurance obligatoire et gratuite, B prenant en charge 75% des dépenses ambulatoires, optionnelle (volontaire) et payante. Les personnes âgées étant souvent atteintes de pathologies chroniques nécessitent une importante prise en charge ambulatoire (rappelons par exemple qu’en France plus de 40% des dépenses ambulatoires sont réalisées pour les affections chroniques), il n’est pas surprenant que 93% des affiliés à MEDICARE aient choisi cette assurance. Mais, et ceci a été l’objet de critiques justifiées si l’on considère que l’équité d’accès aux soins est un objectif, la partie B ne remboursait pas les dépenses de médicaments. On peut envisager au moins deux explications, la volonté de l’Etat fédéral de limiter ses dépenses et les réticences de l’industrie pharmaceutique devant le risque que la puissance publique intervienne pour réglementer les prix et les volumes, à l’instar des contrôles mis en place dans les pays européens. Le résultat était que tous les adhérents MEDICARE qui le pouvaient (soient environ les 2/3) souscrivaient en plus une assurance privée pour leurs dépenses de médicaments, les autres ayant le choix entre ne pas prendre de médicaments ou les payer sur leurs fonds propres. J Madden et coll. montrent comment cette absence de remboursement coïncide avec l’absence de suivi des prescriptions (les patients n’achètent pas les médicaments) chez environ 15% des patients.

La réforme de 2003 « The Medicare Prescription Drug Improvement and Modernization Act of 2003 » a permis d’étendre la couverture MEDICARE en ajoutant une partie C qui permet de souscrire à une assurance privée complémentaire et une partie D qui couvre les dépenses de médicaments. Ceci n’est toutefois pas gratuit, les personnes affiliées à MEDICARE doivent s’acquitter d’une cotisation mensuelle soit auprès de MEDICARE soit auprès d’un autre assureur. Les dépenses de médicaments sont remboursées par MEDICARE selon des modalités assez complexes avec à la fois des franchises et des plafonnements qui rappellent les contrats d’assurance que l’on peut souscrire en France pour son domicile ou sa voiture. En effet, les dépenses médicamenteuses sont remboursées à 75 % jusqu’à un plafond de 2 400 dollars, avec une franchise de 250 dollars. Au-delà de 2 400 dollars (par an) de médicaments ambulatoires, le patient « tombe » dans le fameux « Medigap », le hiatus de remboursement également appelé le « trou du beignet (doughnut hole) » qui se trouve entre 2400 et 5 451 dollars. Ensuite, les dépenses sont à nouveau prises en charge, à 95% cette fois par le «benefit’s catastrophic coverage». Pour les personnes en dessous d’un plafond de ressources, il existe une clause de sauvegarde, qui rappelle le bouclier sanitaire proposé par le rapport Briet-Fragonard. Le reste à charge (la dépense réellement supportée par l’assuré) ne peut excéder 3 850 dollars par an, car, au-delà, l’assuré est remboursé à 100%. Le dispositif est complexe, associant couverture solidaire, incitations financières et couverture par une assurance privée. Elle vise d’une part à permettre un meilleur accès aux soins pour les personnes âgées en offrant un remboursement des médicaments et d’autre part à dissuader une consommation excessive et futile par l’instauration du plafond et des franchises.

Sa complexité en limite sans doute l’efficacité sur la maîtrise « médicalisée » des dépenses, comme le montre l’article de J Hsu et coll. En effet, la moitié des bénéficiaires de MEDICARE ignoraient l’existence du hiatus dans le remboursement des médicaments, ceux qui le connaissaient étant ceux qui y avaient été personnellement confrontés. En ce qui concerne l’accès aux soins, la réforme a apporté une amélioration puisque le pourcentage de personnes n’achetant pas leurs médicaments a été réduit à 11,5% (J. Madden). Toutefois, l’analyse plus fine de la population conclut que les personnes les plus malades ne sont pas celles qui ont bénéficié de la réforme car, chez elles, la non-observance des ordonnances est restée stable. Les résultats de l’étude de J. Madden posent donc toujours la question de l’accès aux soins pour les plus démunis et les plus malades.

L’idée de rembourser les dépenses de santé en associant au critère de besoin le critère de ressources a été mise en œuvre en 2007 car le taux de couverture de MEDICARE pour les soins ambulatoires décroît de 75% pour les personnes à faible revenu à 20% pour les personnes à revenu élevé. Il y a là un changement de philosophie du système public dans le but affiché de contenir la croissance des dépenses publiques. Il est prévu d’inciter les assureurs privés à proposer des couvertures complémentaires pour les « reste à charge » des assurés de MEDICARE.

Quels enseignements peut-on en retirer pour le système de soins français? Si le gouvernement retient pour 2010 les propositions du rapport Briet-Fragonard, il est prévu d’uniformiser les remboursements en supprimant le régime spécial du remboursement à 100% des affections de longue durée. Afin d’éviter de faire supporter une trop lourde charge financière aux ménages sans mutuelle, le rapport préconise de plafonner le reste à charge selon le revenu des ménages. La France introduirait ainsi certains éléments du système MEDICARE mais avec des conséquences financières considérablement moins importantes pour les patients. En effet, les montants du reste à charge tels qu’ils ont été simulés sont 10 fois moindres que ceux de MEDICARE. Le plafond du reste à charge peut être exprimé en euros ou en pourcentage du revenu disponible. Dans la réforme de MEDICARE transparaît la volonté de transférer vers les assurances privées une partie de la prise en charge des dépenses ambulatoires (soins et médicaments). Qu’en est-il en France des transferts entre assurance maladie obligatoire (AMO) et assurance maladie complémentaire (AMC) prévus dans le projet de réforme? Au-delà du plafond les dépenses sont prises en charge entièrement par l’AMO mais en deçà l’AMC rembourse les reste à charge (à l’exception des franchises non remboursables). On ne peut aujourd’hui que tenter de deviner les comportements des assureurs et des assurés mais l’exemple américain nous donne quelques pistes. Les assureurs peuvent proposer des couvertures jusqu’au niveau du bouclier et ce système leur est plutôt profitable car ils plafonnent leur risque. Ils peuvent toutefois redouter d’attirer seulement les patients souffrant d’une maladie chronique qui anticipent d’atteindre le niveau du bouclier, tandis que les autres préfèreront prendre le risque de débourser un reste à charge plafonné à quelques centaines d’euros plutôt que payer la cotisation de la mutuelle. Le danger serait alors de connaître pour ces patients non assurés une situation proche de celle décrite aux Etats-Unis avec un arbitrage entre soins et besoins de base et le risque de renoncer à des soins utiles. En France toutefois les dispositifs de CMU et de CMU complémentaires créent pour les bénéficiaires les garanties d’accès aux soins. L’autre danger, bien illustré par l’article de Hsu est surtout celui de la complexité du dispositif qui annule les effets incitatifs pour une moitié de la population concernée. Cette étude souligne l’importance de développer la notion de « health literacy » 3 pour donner aux patients, en particulier ceux atteints de pathologies chroniques, les moyens de s’orienter et de faire des choix, tant économiques que de santé.

Les commentaires dans le JAMA-français représentent l’opinion des auteurs et du JAMA-français, mais non pas celle de l’American Medical Association.


Informations sur les auteurs

Correspondance : Isabelle Durand-Zaleski. Service de santé Publique. Hôpital Henri Mondor, 51, av du Maréchal de Tassigny, 94010 CRETEIL Cedex, France. Email : isabelle.durand-zaleski{at}hmn.aphp.fr

Liens financiers : Le Dr Durand-Zaleski déclare avoir reçu dans le passé des honoraires en tant qu’oratrice de Pfizer, Nycomed, M.S.D et Medtronics. Elle a également reçu des honoraires de HMPublications pour la rédaction de ce commentaire.

Rôle du sponsor : Le sponsor n’a joué aucun rôle dans la rédaction de ce commentaire sur des articles originaux qui ont été sélectionnés par le comité éditorial du JAMA français. Le sponsor a relu le texte sans en modifier son contenu.

Affiliation de l’auteur : Service de santé Publique. Hôpital Henri Mondor, 51, av du Maréchal de Tassigny, 94010 CRETEIL Cedex, France


BIBLIOGRAPHIE

1. Hsu J.. et coll. Medicare Beneficiaries’ Knowledge of Part D Prescription Drug Program Benefits and Responses to Drug Costs. JAMA. 2008;299(16):1929-1936 FREE FULL TEXT
2. Madsen JM et coll. Cost-Related Medication Non adherence and Spending on Basic Needs Following Implementation of Medicare Part D. JAMA. 2008;299(16):1922-1928 FREE FULL TEXT
3. http://www.sante-jeunesse-sports.gouv.fr/IMG/pdf/rapport_bouclier_sanitaire-2.pdf
4. Études et Résultats n° 600—septembre 2007. Le système d’assurance santé aux États-Unis : Un système fragmenté et concurrentiel. DREES (http://www.sante.gouv.fr)
5. http://www.health.gov/communication/literacy/quickguide/factsliteracy.htm






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