Contexte Le placement d'un parent atteint de démence dans une
structure de soins à long terme est fréquent chez les soignants.
La transition vers le placement et les facteurs qui affectent la santé
et le bienêtre des personnes soignantes après placement du
patient ne sont pas bien décrits.
Objectif Evaluer l'impact de placer un parent atteint de
démence dans une structure de soins à long terme sur la
santé et le bien-être des personnes prenant soin du patient.
Schéma, environnement et participants Etude prospective entre
1996 et 2000 sur la transition après placement auprès d'un
échantillon de 1 222 soignants de patients atteints de démence,
recrutés dans 6 centres des Etats-Unis. Au total, 180 patients ont
été placés dans une structure de soins de long
séjour au cours de la période de suivi de 18 mois. Les
données recueillies avant et après la placement ont
été analysées pour identifier les facteurs
associés au placement, la nature du contact entre les soignants et leur
parents institutionnalisés après placement, et la relation de
ces deux facteurs par rapport au pronostic de santé chez les
soignants.
Principaux critères de jugement Dépression chez les
soignants (symptômes sur l'échelle du Center for Epidemiological
Studies-Depression [CES-D]; extrêmes, 0-60) et anxiété
(State Trait Inventory; extrêmes, 10-40) et usage de traitements
prescrits pour dépression et anxiété.
Résultats Les soignants ayant institutionnalisé un
parent ont rapporté autant de symptômes dépressifs et
d'anxiété que lorsqu'ils délivraient les soins à
domicile. Globalement, les scores CES-D pour la dépression n'ont pas
été modifiés par rapport à la période avant
placement (médiane [IQR], 15,0 [8-24,5] et 15,0 [7,7-28]; P =
0,64). Les scores globaux d'anxiété au State Trait Inventory
n'ont aussi pas été modifiés significativement
(médiane [IQR], 22,0 [19-27] avant vs 21,1 [18-27] après;
P = 0,21). Ces effets ont été plus prononcés
chez les soignants qui étaient mariés au patient (P =
0,02 pour la dépression), qui visitaient le patient plus
fréquemment (P = 0,01 pour la dépression et P
< 0,001 pour l'anxiété) et étaient moins satisfaits de
l'aide qu'ils recevaient des autres (P = 0,003 pour la
dépression et P < 0,001 pour l'anxiété).
L'utilisation d'antidépresseurs n'a pas été
modifiée significativement avant (21,1 %) et après le placement
(17,9 %) (P = 0,16). L'utilisation d'anxiolytiques avant et
après le placement avait augmenté de 14,6 % à 19 %
(P = 0,02) et presque la moitié des soignants (48,3 %)
présentaient un risque de dépression après le placement
de leur parent.
Conclusions La transition vers des soins institutionnalisés
est particulièrement difficile pour les époux, presque la
moitié d'entre eux visitant le patient quotidiennement et continuant
à apporter de l'aide aux soins pendant leurs visites. Des interventions
cliniques qui préparent mieux les soignants pour une transition vers un
placement et traitent leur dépression et leur anxiété
à la suite du placement peuvent apporter un bénéfice
important à ces personnes.
JAMA. 2004;292:961-967.