Contexte Les résultats favorables en prévention secondaire de
traitements cardiovasculaires tels que les statines ont été bien
établis. Toutefois, ces traitements ne sont peut-être pas
utilisés d'une manière optimale chez les patients ayant le plus
de chances d'en tirer profit. Dans l'idéal, il devrait y avoir une
corrélation entre l'empressement des médecins à prescrire
ces traitements bénéfiques et les risques cardiovasculaires de
base des patients.
Objectif Examiner l'association entre la tendance du médecin
à prescrire un traitement et le risque cardiovasculaire de base.
Plan expérimental, cadre et participants Etude de cohorte
rétrospective utilisant plusieurs bases de données
administratives concernant les soins médicaux, reliées entre
elles et couvrant plus de 1,4 million de personnes âgées
résidant dans l'Ontario. Nous avons inclus 396 077 patients
âgés de 66 ans ou plus, ayant des antécédents de
maladie cardiovasculaire ou de diabète, suivant un traitement
médical et en vie au 1er avril 1998. Le risque
cardiovasculaire de base découlait d'un indice de risque ajusté,
après modélisation de la probabilité de
décès dans les 3 ans de suivi.
Principal critère de jugement Probabilité de
prescription d'une statine, stratifiée selon le risque cardiovasculaire
de base, après ajustement sur l'âge, le sexe, le niveau
socio-économique et le type d'habitat, rural ou urbain.
Résultats Seulement 75 617 patients (19,1 %) dans cette
cohorte de prévention secondaire avaient une prescription de statine.
Chez les patients âgés de 66 à 74 ans, les
probabilités ajustées d'avoir une prescription de statine
étaient de 37,7 %, 26,7 % et 23,4 % dans les catégories de
patients à risque de base, respectivement, bas, intermédiaire et
haut. La probabilité d'avoir une prescription de statine baissait de
6,4 % (odds ratio ajusté: 0,94; intervalle de confiance à 95 %:
0,93-0,95) pour chaque année d'âge supplémentaire et
chaque augmentation de 1 % du risque de décès prédit
à 3 ans. L'âge et le risque de base avaient des effets
synergiques sur la prescription de statine (interaction, p <
0,001).
Conclusions Nous avons découvert que la prescription d'une
statine devenait progressivement moins fréquente au fur et à
mesure que le risque cardiovasculaire de base et la probabilité de
décès du patient augmentait. Dans la mesure où les
bénéfices d'un traitement dépendent du risque de base,
les bénéfices maximums que l'on peut attendre des statines ne se
concrétiseront peut-être pas tant que ces traitements ne seront
pas également prescrits aux patients ayant les risques les plus
élevés.
JAMA. 2004;291:1864-1870.