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  Vol. 300 No. 7, 20 août 2008 TABLE OF CONTENTS
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Médecine, spiritualité et prise en charge du patient

Pat Fosarelli, MD, DMin

En tant que médecin et spécialiste en théologie pastorale, et en ma qualité de professeur m’adressant à des étudiants en médecine, infirmerie, aumônerie et théologie, l’on me pose souvent la question (particulièrement lorsqu’il est question des besoins des patients gravement malades et mourants) : « Les soins spirituels représentent-ils toujours une partie importante des soins médicaux ? Si c’est le cas, qui devrait en évaluer le besoin ? »

La religion est définie comme « le service et le culte de Dieu ou du surnaturel ; un ensemble personnel ou un système établi d’attitudes, de croyances et de pratiques religieuses » ; et la spiritualité est définie comme « la qualité ou l’état d’être spirituel » (spirituel signifiant « de ou ayant trait aux choses sacrées »)1. De l’avis de la majorité des personnes, la religion serait associée aux pratiques formelles et aux règles qui relient une personne au sacré. La spiritualité ne se fondant habituellement pas sur les lois humaines de la raison ou de la logique, elle est souvent décrite comme la partie non logique ou non rationnelle de l’être humain qui relie au sacré – Dieu, le Principe Ultime ou Universel (en fonction du système de croyances). Bien nombreux, toutefois, sont ceux pour qui la religion et la spiritualité se confondent, étant donné que les pratiques spirituelles d’une personne sont le résultat de la religion que celle-là adopte. Néanmoins, dans le cas d’expériences remplies de la présence du saint (terrifiant), le spirituel transcende les expériences humaines ordinaires.


LA MEDECINE ET LA SPIRITUALITE PEUVENT-ELLES ETRE ABORDEES DANS LE MEME CONTEXTE ?

La science de la médecine est très rationnelle et s’intéresse aux causes, aux diagnostics et aux remèdes. L’art médical de guérir inclut et va au-delà de la science et prend en compte ce qui donne à la personne un sens : ce qu’il ou elle aime, ses priorités, ses croyances, ses craintes, ses rêves et ses questions.

À cause de leur propre expérience de la foi ou de celle de leurs patients, certains médecins considèrent que la spiritualité fait partie de la condition humaine et que, en tant que telle, elle fait partie de l’art de guérir pratiqué par les médecins. La pratique de la médecine, dans ce qu’elle a de meilleur à offrir, implique beaucoup plus que la connaissance de la bonne science. Elle implique le travail avec la personne dans son ensemble et non seulement sur une partie malade du corps. Même s’ils reconnaissent les vécus religieux des patients, d’autres médecins considèrent que le rôle de la spiritualité en médecine est réduit, voire inexistant. À l'instar du philosophe des Lumières René Descartes, ces médecins considèrent que soigner le corps et ses troubles relève d’un domaine entièrement différent de celui de la spiritualité. La médecine étant rationnelle et le soin spirituel étant non rationnel, ils sont inconciliables. Cette dichotomie est acceptée par bon nombre de médecins.


LES POINTS DE VUE DE DEUX MEDECINS

Hippocrate, le père de la médecine, disait : « La prière est, en effet, une bonne chose », cependant, ajoutait-il, « mais, tout en faisant appel aux dieux, l’homme devrait s’aider lui-même. »2 Bien qu’Hippocrate et d’autres grands médecins de l’Antiquité, tels que Galien, n’avaient pas de difficultés à recommander aux personnes de demander l’aide des dieux (particulièrement Esculape) pour guérir, ils croyaient également à la pratique médicale de leur époque. En d’autres termes, priez et consultez le médecin ! Hippocrate avait compris que c’était l’être humain qui se trouvait dans un état ou avait une maladie et non l’inverse. « Il est plus important de savoir quel est le type de personne qui a une maladie plutôt que de savoir quel est le type de maladie qu'une personne a. »3

Osler, le père de la médecine américaine, reprend Hippocrate : « Soyez particulièrement attentif au patient individuel plutôt qu’aux caractéristiques spéciales de la maladie. »4 (p.43) Osler avait compris que l’objectif de la médecine est de soulager la souffrance humaine dans ses différentes formes, chaque fois que cela est possible. Bien qu’Osler prévenait qu’il pouvait être dangereux de mélanger science et foi religieuse, il reconnaissait la valeur de cette dernière : « Rien dans la vie n’est plus admirable que la foi, cette grande force mobilisatrice que nous ne pouvons ni peser à l’aide d’une balance ni tester. . . connue uniquement par ses effets, de la foi jaillit un courant intarissable d’énergie ne perdant pas une once de sa puissance. »4(p.262) Osler comprenait l’importance de la foi dans son sens large, la foi en le médecin, la foi en les médicaments ou les procédés et la foi en une puissance surnaturelle.


L’IMPORTANCE DE LA SPIRITUALITE DANS LA VIE DE L’HOMME

Pour plusieurs patients, la foi en le surnaturel (c'est-à-dire, la spiritualité) est importante – tant quand on est en bonne santé que (particulièrement) quand on est malade. La foi donne un sens à leur vie, elle leur apporte le réconfort quand leur vie ne va pas bien et elle est là quand d’autres ressources ont été dépensées.

Dans la majorité des cas, la foi du patient lui apporte un soutien au moment où il en a le plus besoin. Il faut reconnaître que toutes les fois ne présentent pas un contenu positif, car la foi en une divinité fâchée ou punitive ne donne habituellement pas de résultats positifs. En outre, il existe des cas où les croyances religieuses ou la spiritualité d’une personne font plus de mal que de bien. Que ce tort ait ses racines dans un enseignement incorrect par un tiers ou dans la compréhension incorrecte par la personne concernée, le besoin de comprendre la dynamique est le même. Par exemple, une femme atteinte du virus HIV qui ne prenait pas ses médicaments en expliqua la raison : « Prendre des médicaments serait un « affront » à Dieu, ce serait m’efforcer d’éviter la punition que je mérite parce que je me droguais. » Bien que peu de médecins partageraient son point de vue, ils pourraient l’écouter et en parler avec elle, l’encourageant à parler avec un aumônier ou un prêtre qui pourraient l’aider à prendre conscience du fait que prendre ses médicaments ne signifiait pas nécessairement « faire un affront » à Dieu.


DECOUVRIR LES CROYANCES DU PATIENT

Koenig5 note que plusieurs études ont révélé que non seulement une majorité des patients ne seraient pas dérangés si leur médecin leur posait des questions sur leurs croyances religieuses mais, en plus, qu’ils souhaiteraient qu’il le fasse. Lorsqu’ils sont vulnérables à cause de la maladie, plusieurs patients veulent que les médecins connaissent ce qui leur donne un sens, du réconfort et un soutien. Cela ne signifie pas que les médecins doivent partager ces croyances. Les médecins doivent écouter avec respect et, si le patient semble être tourmenté à cause de ces croyances, ils doivent demander s’il a parlé ou s’il souhaiterait en parler à un aumônier ou un membre du clergé. En effet, c’est tout ce que la majorité des médecins sont prêts à faire, mais ils devraient vouloir le faire. Charger de cette tâche une infirmière ou un travailleur social équivaut à manquer à l’art de la médecine, peu importe la compétence dans la pratique de la science.

Mais, il existe également des raisons d’ordre réglementaire à s’enquérir de la spiritualité du patient. La Commission conjointe demande qu’une anamnèse spirituelle soit obtenue auprès de chaque patient admis en hôpital de soins intensifs ou en maison de retraite ou sous observation par une agence de soins de santé à domicile, et que cette anamnèse spirituelle soit enregistrée dans le dossier médical6. Bien qu’il existe plusieurs outils d’évaluation spirituelle, la majorité a été utilisée à des fins de recherche plutôt que dans le contexte de la prise en charge du patient. Les meilleurs outils utilisent des questions ouvertes conçues de façon à donner au patient l’opportunité de fournir une réponse complète plutôt qu’un « oui » ou un « non » sommaires. Toutefois, même lorsque « oui » ou « non » ne sont pas la réponse appropriée, le médecin pourrait vouloir que le patient développe sa réponse. Nous proposons, ci-dessous, deux exemples d’outils d’évaluation spirituelle.

Un instrument en 4 questions (dont l’acronyme est CSI-MEMO)5,7 fournit un dispositif permettant de mettre en évidence les sources spirituelles de réconfort (ou d’angoisse), de sens et de communauté d’une personne.

1. Vos croyances religieuses / spirituelles sont-elles une source de réconfort ou bien une source d’angoisse ?

2. Avez-vous des croyances spirituelles qui peuvent influencer sur vos décisions d’ordre médical ?

3. Êtes-vous membre d’une communauté religieuse ou spirituelle et vous apporte-t-elle un soutien ?

4. Avez-vous d’autres besoins spirituels que vous souhaiteriez voir abordés par quelqu’un ?

FICA (Faith, Importance, Community, Address - Foi, Importance, Communauté, Approche)8 fut développée comme une méthode permettant de compléter l’anamnèse personnelle et sociale (soutien) du patient.

Foi : « Quelle sont votre foi ou vos croyances ? » (Vous considérez-vous comme une personne spirituelle ou religieuse ? Quelles sont les choses en lesquelles vous croyez et qui donnent un sens à votre vie ?) »

Importance : « Est-ce important dans votre vie ? (Est-ce que cela a une influence sur la façon dont vous prenez soin de vous-même? De quelle façon est-ce que vos croyances ont influencé votre comportement au cours de cette maladie ? Quelle est le rôle de vos croyances dans le fait de retrouver votre santé ?) »

Communauté : « Êtes-vous membre d’une communauté spirituelle ou religieuse ? (Est-ce que cela est d’un quelconque soutien pour vous et de quelle façon ? Y a-t-il une personne ou un groupe de personnes que vous aimez véritablement ou qui sont véritablement importants pour vous ?) »

Approche : « Comment voudriez-vous que j’aborde ces questions dans le contexte de votre prise en charge ? »

Si elles sont posées avec empathie, sans volonté de prosélytisme, sans porter de jugement, les questions de ces instruments sont conçues de façon à faire émerger des informations sur les ressources (spirituelles ou autres) dont le patient dispose au cours de sa maladie. En tant que telles, elles peuvent révéler des attitudes qui pourraient faire « le succès ou l’échec » d’un traitement médical. Ce fait est notamment illustré par la deuxième question du CSI-MEMO et par la dernière question de l’outil FICA.

Bien que de nombreux médecins soient en mesure d’évaluer l’importance que la religion et la spiritualité ont pour les patients9, ils sont de loin moins nombreux à considérer qu’ils doivent être ceux qui poseront les questions, étant persuadés que d’autres sont bien plus qualifiés pour cette tâche. En outre, plusieurs médecins s’abstiennent d’entamer des conversations sur la spiritualité mais répondrons si le patient soulève la question, persuadés que si la foi et la spiritualité sont des sujets suffisamment importants pour que le patient en parle, il est important que le médecin y réponde. Encore moins nombreux sont les médecins qui entameraient une prière avec les patients, considérant que ce faisant ils imposeraient de façon indiscrète leurs propres croyances ou mode de prier à des personnes vulnérables. Par exemple, si un médecin demande poliment : « Voudriez-vous que je prie avec vous ? », cela pourrait représenter un dilemme pour le patient. Si le médecin souhaite réellement prier, le patient qui est pris en charge par lui a-t-il véritablement la liberté de refuser ?


ÉTUDES SUR L’ETAT DE SANTE ET LA FOI, LA CROYANCE OU LA PRIERE

Il existe de nombreuses publications, aussi bien pour que contre le fait d’inclure la spiritualité dans la prise en charge du patient. En outre, de nombreuses études ont étudié l’association entre les croyances et les pratiques spirituelles et les résultats du point de vue de la santé, aussi bien dans l’ensemble que pour des maladies précises10. Toutefois, à cause des variables mal définies, des critères indéterminés et des variables parasites, certaines de ces études sont conçues et menées de façon tellement médiocre qu'elles fournissent peu, voire, aucune information essentielle. Il faut toujours aborder avec circonspection les études scientifiques de la spiritualité et de la santé des patients. Par exemple, comment la spiritualité ou la croyance religieuse sont-elles mesurées ? Par le fait d’assister aux messes ? Bon nombre de personnes très spirituelles n’assistent jamais à la messe. La croyance en en Dieu ? Selon les sondages Gallup qui couvrent plus de 40 ans, la majorité des citoyens Américains affirment croire en Dieu11. L’engagement dans des pratiques spirituelles (p.ex., la prière) ? Nombreuses sont les personnes qui prient. La spiritualité étant non logique et la science de la médecine étant, pour sa part, très logique, les modes scientifiques de mesure de la « spiritualité » (pour autant qu’elle puisse être mesurée) peuvent donner des résultats qui, au mieux, sont embrouillés ou, au pire, erronés.


LA SPIRITUALITE DU MEDECIN

L’on ignore souvent que le médecin a sa propre spiritualité qui donne un sens à sa vie. Bien qu’il puisse ne pas croire en un Dieu personnel, le médecin peut croire en quelque chose (p.ex., en un Principe Unifiant ou Universel) qui transcende la personne individuelle et le domaine du physique. En conséquence, bien que la spiritualité d’une personne plonge habituellement ses racines dans une tradition religieuse, ce n’est pas toujours le cas. Plusieurs facteurs peuvent affecter tant le processus de prise de décisions d’ordre éthique que les décisions elles-mêmes, mais la spiritualité de la personne joue de toute évidence un rôle. Ainsi, il est bon que le médecin ait conscience de sa propre spiritualité, particulièrement lorsqu’il est en conflit avec celle d’un patient donné, parce que chaque perspective peut apprécier une situation morale différemment. Par exemple, un médecin peut croire en Dieu tout en considérant qu’il est injustifié d’utiliser des moyens extraordinaires lorsqu’un patient approche de la mort, tandis que le patient ou (plus probablement) un membre de sa famille peut considérer que toutes les mesures devraient être poursuivies indéfiniment parce que seul Dieu peut mettre fin à une vie. Les médecins comprennent souvent mieux les points de vue des autres quand ils arrivent à accepter les leurs.


SOMMAIRE

La spiritualité est une partie importante de la prise en charge médicale, particulièrement lorsque les patients sont gravement malades ou mourants, parce que la spiritualité fait partie de ce que cela signifie d’être humain. Il est important que les médecins comprennent non seulement leur spiritualité mais aussi celle de leurs patients. C'est la raison pour laquelle, bien que les médecins ne doivent pas nécessairement apporter des soins spirituels, poser des questions pour identifier les besoins spirituels de leurs patients pourrait être dans l’intérêt supérieur aussi bien du médecin que du patient.

Néanmoins, la prudence est de mise lorsque l’on aborde des études scientifiques de la spiritualité en rapport avec la santé du patient, pour s’assurer que ces études ne soient ni acceptées de bon cœur ni sommairement rejetées sans examen approfondi. Les deux positions extrêmes seraient erronées et ne feraient pas justice au travail sérieux qui est réalisé dans ce domaine.


Informations sur les auteurs

Correspondance: Pat Fosarelli, MD, DMin, The Ecumenical Institute of Theology, 5400 Roland Ave, Baltimore, MD 21210 (pfosarelli{at}stmarys.edu).

Liens financiers avec des entreprises commercialisant des produits de santé : Aucun lien déclaré.

Affiliation de l’auteur: The Ecumenical Institute of Theology, Baltimore, Maryland.

FMC disponible en ligne sur www.jamaarchivescme.com et questions p 856.


BIBLIOGRAPHIE

1. Merriam-Webster Online Web site. http://www.merriam-webster.com. Accédé le 29 janvier 2008.
2. The Quotations Page. Quotations by author. http://www.quotationspage.com/quotes/Hippocrates. Accédé le 25 janvier 2008.
3. BrainyQuote Web site. Hippocrates quotes. http://www.brainyquote.com/quotes/authors/h/hippocrates.html. Accédé le 25 janvier 2008.
4. Silverman M, Murray TJ, Bryan C. The Quotable Osler. Philadelphia, PA: American College of Physicians; 2003.
5. Koenig H. Chapter 1: Spirituality in Patient Care. 2ème éd. Philadelphie, PA: Templeton Foundation Press; 2007.
6. The Joint Commission. Spiritual assessment. http://www.jointcommission.org/AccreditationPrograms/Hospitals/Standards/FAQs/Provision+of+Care/Assessment/Spiritual_Assessment.htm. Mise à jour : 1 janvier 2004. Accédé le 5 février 2008.
7. Koenig HG. An 83-year-old woman with chronic illness and strong religious beliefs. JAMA. 2002;288(4):487-493. FREE FULL TEXT
8. Puchalski C, Romer A. Taking a spiritual history allows clinicians to understand patients more fully. J Palliat Med. 2000;3(1):129-137. PUBMED
9. Curlin FA, Sellergren SA, Lantos JD, Chin MH. Physicians' observations and interpretations of the influence of religion and spirituality on health. Arch Intern Med. 2007;167(7):649-654. FREE FULL TEXT
10. Mueller PS, Plevak DJ, Rummans TA. Religious involvement, spirituality, and medicine: implications for clinical practice. Mayo Clin Proc. 2001;76(12):1225-1235. FREE FULL TEXT
11. Site Web GALLUP. Page de recherche. http://www.gallup.com/search/default.aspx?q=religion&s=. Accédé le 18 février 2008.

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JAMA. 2008;300:765.
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