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  Vol. 300 No. 16, 22/29 octobre 2008 TABLE OF CONTENTS
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Saskya


Figure 1
Rembrandt Harmenszoon van Rijn, 1606-1669, Saskya, 1634, hollandaise, ©RMN, Le Louvre

« Il n'est rien de plus laid qu'une vieille chair délabrée évoquant la sensualité. Je ne veux pas vous imposer cela. A partir d’un niveau de décrépitude, on ne doit plus aborder certains sujets sous peine de provoquer le dégoût en croyant susciter la concupiscence. Aussi devrez-vous désormais vous y prendre autrement. » Elle se leva et quitta la table, se dirigea dans l’obscurité, vers le salon éclairé à la faible lueur des bougies, au milieu des livres et, adroitement sortit délicatement un carnet de cuir mandarine du tiroir de son secrétaire. « Tenez, lorsque je me suis décidée à devenir votre épouse, j’ai consigné ceci. » Il ouvrit le volume.

Rembrandt, un des peintres inégalé de la lumière, dessinateur et graveur incomparable, resta ébranlé et ému à la pensée que sa femme avait reconstitué un ensemble unique de leur histoire d’amour et de son œuvre.

Cet extraordinaire artiste hollandais, contemporain de Rubens est à juste titre considéré à son époque comme le meilleur peintre de l’âme humaine et le chef de file de l’âge d’or hollandais. Bien que l’existence et la pensée de ce génie nous soient peu connues, la vie de Rembrandt est, comme sa peinture pleine de demi-teintes et de coins sombres. Autant Rubens se montre tel qu'il était au plein jour de ses œuvres, de sa vie publique, de sa vie privée, net, lumineux et tout chatoyant d'esprit, de bonne humeur, de grâce hautaine et de grandeur, autant Rembrandt se dérobe et semble toujours cacher quelque chose, soit qu'il ait peint, soit qu'il ait vécu. Rembrandt est né à Leyde (Pays-Bas) le 15 juillet 1606 et mort à Amsterdam le 04 octobre 1669. Considéré comme l’un des plus grands peintres hollandais de son temps, Rembrandt Harmenszoon van Rijn a marqué l’histoire de la peinture par une technique remarquable du clair-obscur. À la fois peintre, dessinateur et graveur, il est né d’un père meunier.

Rembrandt semble tout d’abord se destiner à une carrière plus intellectuelle. Parlant déjà le latin, il entre à l’université dès sa quatorzième année mais ne tarde pas à réaliser que ce chemin ne lui convient pas. Attiré par l’art, il décide plutôt de suivre des cours auprès des peintres hollandais. Pendant fort longtemps rien ne transpire de sa vie. Il reste le témoignage de Sandrart ou de ses élèves, ceux du moins qui ont écrit, Hoogstraeten, Houbraken, et tout se réduit à quelques légendes d'ateliers, à des renseignements contestables, à des jugements trop légers, à des commérages. Ce qu'on sait de sa personne, se sont des manies, quelques trivialités, des défauts. On cite quelques fragments de leçons orales recueillis par la tradition qui sont des vérités de simple bon sens, mais ne tirent point à conséquence.

Il n'a pas vu l'Italie, ne recommande d’ailleurs pas ce voyage, et pour ses disciples devenus des docteurs en esthétique, ceci constitue un grief et l'occasion de regretter que leur maître n'eût pas ajouté cette culture nécessaire à ses saines doctrines et à son original talent. On lui connaît des goûts singuliers, l'amour des vieilles friperies orientales, des casques, des épées, des tapis d'Asie et cette baroquerie, jointe à la passion de l'argent, donne à la figure méditative de ce travailleur acharné un air de chercheur d'or ou de perfection.

En 1632 Rembrandt réalise « La leçon d'anatomie du Dr Nicolas Tulp » installé à Amsterdam, témoignage qu’il s’intéresse aussi à la science, il est chargé de réaliser un portrait du médecin dirigeant une leçon d’anatomie a sept notables. La scène s’est réellement déroulée. L’histoire certifie qu’il s’agit du cadavre d’un condamné à mort.

Le but est alors d'accentuer le prestige de chacun des hommes et, pour cela, Rembrandt parvient à dépeindre une expression de curiosité et de forte concentration dans le regard de chacun. Une fois encore, il joue sur l'obscurité et la lumière pour atteindre ses objectifs et donner à son œuvre une impression de mouvement et de scène prise sur le vif.

Le temps passe, Rembrandt est connu, il épouse Saskia van Uylenburg le 22 Juin 1634, la nièce de son marchand d'art, chez lequel il s'était d'ailleurs installé en 1631. Déjà renommé, Rembrandt renforce sa notoriété en côtoyant la bourgeoisie néerlandaise et multiplie les commandes de portraits et peintures historiques. Il représente sa femme dans de nombreuses toiles, portant les divers costumes et accessoires qu'il aime dépeindre dans ses œuvres.

Il est difficile de l'isoler du mouvement intellectuel et moral de son pays et de son temps. Né plutôt partout ailleurs, il n'aurait pas eu l’immense mérite de clore un passé et d'ouvrir une des grandes portes de l'avenir.

Sous tous les rapports, il a trompé bien des gens. Comme homme, il manquait d’élégance, et l'on en a conclu qu'il était grossier. Comme homme d'étude, il a dérangé plus d'un système, et l'on en a conclu qu'il manquait de connaissances. Comme homme de goût, il a péché contre toutes les lois communes, et l'on en a conclu qu'il manquait de goût. Comme artiste épris du beau, il a donné des choses de la terre quelques idées fort laides.

Personne n'a pas remarqué qu'il regardait ailleurs.

En tout état de cause, si fort qu'on le vantât, si méchamment qu'on l'ait dénigré, si injustement qu'on l'ait pris, en bien comme en mal, à l'inverse de sa nature, personne n’a soupçonné exactement sa vraie grandeur.

Telle est cependant sa force créatrice que cet esprit si particulier, si personnel, donne aux sujets qu'il traite une expression générale, un sens intime et typique que les grands penseurs ou dessinateurs épiques n'atteignent pas toujours.

En procédant à sa façon, en extrayant de cet œuvre si vaste et de ce multiple génie ce qui le représente en son principe, et en éliminant sa palette, ses pinceaux, ses huiles colorantes, ses glacis, ses empâtements, tout le mécanisme du peintre, on arrive enfin à saisir l'essence première de l'artiste.

Rembrandt est tout entier esprit, tendances, imaginations, rêveries, bon sens, chimères.

Il sera difficile voire impossible de rendre et de reproduire ses œuvres, la réalité sans rien pour décor, ni fioriture, vingt eaux-fortes de lui le révèlent, font pressentir tout le peintre, et, mieux encore, l'expliquent : même insistance, même étrangeté dans le savoir faire, même désespoir et totale réussite par l'expression.

Emma Guerlain, MA







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